NEVER ENDING OBJECT

En collaboration avec Yann Le Guennec -2011-2014

Never Ending Object
Avec Yann Le Guennec, nous nous sommes concentrés sur l’écriture d’une histoire, de son commencement à ses potentiels renouvellements. Une histoire sans fin est née de notre rencontre (http://www.never-ending-object.com). Comment créer de la matière mouvante, qui de son contenu à son conditionnement voyage à travers différents espaces et différents niveaux de réalité ? Nous avons voulu représenter le moment où le statut d’une chose glisse du visible à l’invisible et inversement. Nos expérimentations ont pris, elles aussi, différentes formes dans plusieurs espaces, physiques et virtuels. Concentrons-nous sur la description des passages d’un état à un autre, du statut d’une chose à une autre tels que nous avons voulu les représenter, les fixer un temps et enfin les analyser.
Comment opérer une mise à jour d’une chose, pour quelles raisons, et quelle effet cela a-t-il sur elle ?
Notre volonté était de donner naissance à une « chose » et de lui organiser une vie exceptionnelle, faite de temps ajoutés, inventés, ré-inventés, renouvelés. Nous pensions : mise à jour, actualisation, remise en circulation, recyclage et enfin temporalité subjective. Ces idées nous accompagnaient au plus profond de nous, symbole d’un désir de prendre en considération toutes « choses » et tout temps, le tout tourbillonnant dans un même mouvement. La forme se devait autant de figurer ce désir du « je désire considérer tout ensemble », que d’inventer une formule « magique » permettant ces passages et ces rencontres, sans hiérarchisation aucune entre les « choses ». Comme une sorte de palimpseste qui se transforme au fil du temps, cherchant à être au plus proche du « goût du jour », sachant précisément qu’il ne dure pas, nous organisions pour ces « choses », des trajets neufs, en les faisant sans cesse dévier de leur course logique. Toute « chose » est par principe accompagnée de sa trajectoire ; en mouvement seraient alors toutes les choses du monde ? Permettre à « la chose » de quitter son orbite lui confère un sentiment de liberté, lui offre un destin a priori inapproprié. Travestir et investir la « chose » d’autres sens, interférer son histoire lui donne alors une nouvelle origine, une nouvelle appartenance et modifie son issue l’envoyant vers une infinité d’avenirs possibles.
Ces expérimentations nous donnaient l’impression de ré-écrire la définition des « choses » du monde et d’agir sur leurs apparitions, leurs disparitions… Manipuler l’écriture de l’histoire, retenir ceci plutôt que cela et inventer ce qui doit être perdu momentanément ou définitivement animaient nos motivations. Comment ?
Modifier la trajectoire d’un objet est possible et réalisable en usant de tous les stratagèmes : associer/ répliquer/ détruire (partiellement)/ déplacer/ dissimuler/ rendre discret/ mettre en scène la disparition / sacrifier / séparer / soustraire … Nous avions remarqué que le changement d’état d’une forme en une autre crée un moment, donnant naissance à une durée. Cet espace-temps créé donne à la chose sa capacité à durer, à exister dans le mouvement. Ce temps « ajouté » existe bel et bien et se donne véritablement à voir. Il devient autonome et ne dépend que de lui-même. Quand une « chose » se soustrait pour laisser la place à une autre, il est alors possible qu’un monde s’invente. Cet instant, nous le percevions comme étant le symbole de la création même des « choses ».
En définitive nous aimions provoquer cette dépense d’énergie afin de mettre en scène ces phénomènes qui font évènement. Un évènement, un récit qui prend corps, une histoire qui peut naître. Celle des origines ? Il y aurait alors autant d’origines qu’il y a de changements d’état provoqués par l’acte de réactualiser. Nous avons travaillé avec joie et sérieux concernés par le monde et ses interstices.
Ma collaboration avec Yann Le Guennec a ouvert des espaces aux seuils desquels je me tenais attendant notre rencontre. Ces espaces restent ouverts.

 

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Les traces documentaires, photographiques et textuelles, produites par l’activité du Laboratoire Art et Archéologie – Never Ending Object, sont collectées sur un site web (www.yannleguennec.com/neo).
Pour l’installation-performance «Prévisualisation de quelques principes d’exposition de l’objet sans fin», ces documents imprimés (issus des précédentes expositions N.EO.) ainsi qu’un ensemble de nouvelles pièces, sont injectés dans un cycle de déplacements et de manipulations, pilotable collectivement par Internet. L’installation-performance est une projection de la mémoire et de l’actualité du laboratoire dans un nouvel espace-temps poétique de transformation. La métaphore du chantier de fouille archéologique est mobilisée, un chantier quelque peu inversé où il s’agit de tenter de redécouvrir ce qui a existé, mais également d’en accélérer l’évolution pour en perturber les significations possibles. Le carroyage métaphorique du chantier devient la carte d’un imaginaire en mouvement, le contexte d’émergence d’un ensemble d’éléments pour la reconstruction de mythologies hybrides et intermédiaires, capables de relier ce qui semble le plus disjoint, dans l’espace et le temps.

N.E.O. VI expose et rejoue l’activité du laboratoire. Sous forme de répliques en terre, 20 œuvres exposées lors des précédents NEO reprendront vie, retrouveront leur forme. Ce dispositif pose la question de l’authenticité, de l’origine, en créant une rencontre simultanée entre passé, présent et futur. Dans un nouvel espace-temps poétique matérialisé par des liens mouvants, les objets se redéfinissent à mesure que la carte se déplace sur eux. Accélérer la transfor- mation, donc le temps du laboratoire passé et à venir mobilise la métaphore du chantier de fouille archéologique, une fouille o il s’agit de tenter de redécou- vrir ce qui lie les objets entre eux. Le contexte des objets invoque la création de nouvelles mythologies intermédiaires, capables de relier ce qui semble le plus disjoint, dans l’espace et le temps, dans l’espace-temps du sens en devenir.